Je dois reconnaitre que j’ai été un peu naïf.
En écrivant cela, je ne peux pas m’empêcher de repenser à toutes les fois ou des gens m’ont dit que la politique, était une affaire de combines, de petits arrangements, d’accords stratégiques et de basses manœuvres.
Je me revois, répondant invariablement qu’il ne fallait pas tout mélanger, que ces pratiques étaient minoritaires et que nous, socialistes, restions profondément attachés au débat d’idée, à la démocratie et soudés autours de nos valeurs. Voilà qui devait te faire sourire.
Avec honnêteté, détermination, inlassablement je me suis battu sur le terrain pour nos idées, pour un projet et pour une certaine idée de ma ville de Vénissieux.
Si on m’avait dit qu’un jour, tu me demanderais de faire table rase de mes convictions, de mes idéaux pour ma ville, j’aurais refusé de le croire !
Si on m’avait expliqué qu’un jour, dans un style qui n’est pas sans rappeler les dérives autoritaristes staliniennes ou trotskistes, tu n’hésiterais pas à faire mettre sous tutelle la section PS de Vénissieux et à m’informer via un communiqué de presse de mon exclusion imminente du parti je n’en aurais pas cru un mot…
Mon « crime » ? Avoir refusé de me soumettre à tes petits calculs politiques. Avoir refusé que Vénissieux, Vaulx en Velin et Feyzin deviennent des monnaies de tractation et d’échange afin de « sauver Villeurbanne ». Avoir refusé des alliances incohérentes et opportunistes qui auraient desservies ma ville.
Oui, j’ai été naïf, mon cher Yann. Mais je ne sais pas faire autrement. Je ne sais pas défendre pendant des années un projet, des idées, je ne sais pas m’opposer de toutes mes forces contre une politique que je juge néfaste et mauvaise, pour ensuite s’allier à cette même politique.
Je ne sais pas faire allégeance à des gens que j’ai toujours combattu pour conserver un peu de pouvoir.
Toi tu sais visiblement. Toi tu sais composer, négocier, abandonner, élaborer des stratégies au service d’une ambition. Toi tu sais faire taire et exclure ceux qui se mettent en travers de ton chemin. Tu es du sérail, tu as commencé à l’UNEF, tu as fait de la politique toute ta vie. Tout cela t’est naturel et facile.
Moi je ne suis qu’un ex cantonnier, un obscur petit militant de base qui a eu l’audace de ne pas penser comme toi et de s’opposer à tes dérives.
Mon cher Yann, tu as beau être très à gauche, tu te comportes comme un grand bourgeois capricieux et autoritaire. Sache pourtant qu’il est fini le temps où l’on congédie d’un geste dédaigneux le petit personnel quand il ne sert plus ses intérêts et qu’il ose se rebeller.
Ce vieux monde se meurt Yann, il agonise dans vos petites combines, dans vos compromissions et dans votre mépris des électeurs.
Mon cher Yann, j’ai peut-être été un peu naïf en effet, quand il aurait fallu être cynique et calculateur. Tu me trouves peut-être ingérable et entêté, quand tu m’aurais voulu discipliné et résigné.
Je te l’ai dit, je ne sais pas faire. Et je n’ai aucunement l’intention d’apprendre.
Les vénissians trancheront.
Ton camarade Lotfi de Venissieux